Descente dans les ateliers de la liberté de la presse. / Lithographie - J.J. Grandville - Auguste Despéret.

Publié probablement dans le journal L'Association Mensuelle, en novembre 1833.

France. Paris, le 1er avril.

La liberté de la presse a décidément expiré pour les journaux, le jour du Jeudi-Saint, à l'heure des ténèbres. Ses amis croient fermement à sa résurrection. Nous manquons de l'espace nécessaire pour rendre compte des détails qui ont précédé son agonie, et de l'attitude ferme qu'on montré ses défenseurs ; devant les Judas qui la trahissaient, les Pierre qui la reniaient, les Hérode qui la condamnaient, et des Pilate qui l'abandonnaient à ses bourreaux.
Le décret de suspension est déjà inséré dans le Moniteur de ce jour, avec la formule ordinaire : " Car tel est notre plaisir ; et afin que ce soit chose ferme et stable à toujours. "


- MM.Baudoin frères, imprimeurs libraires, annoncent qu'à compter du jour où la censure sera établie, ils se chargerons d'imprimer dans un volume intitulé : le petit Moniteur, tous les articles ou passages que M.M les censeurs aurons jugé à propos de retrancher, soit dans les journaux, soit dans les feuilles hebdomadaires.

Lundi et mardi le 3 et 4 avril 1820./ N° 94 et 95.

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France. Paris, le 10 avril.

Une circulaire du préfet de police appelle toute la sévérité de ses agents sur les réunions de faiseurs de chansons. Ces réunions appelées goguettes, est-il dit dans cette circulaire, sont composées de gens animés d'un mauvais esprit.

Dans la plupart on chante des chansons, on lit des poésies, où à la faveur et sous le voile de l'allégorie, le gouvernement, la religion, les mœurs, les choses, les personnes, sont outragées, menacées, attaquées.
La police aura, certes, beaucoup à faire dans cette guerre ouverte, déclarée à la gaîté française.
Quand tous les ignorantins s'en mêleraient, elle ne doit pas se flatter de réussir.

Comment, en interdisant les goguettes, ne craint-elle pas d'exciter à des tentatives plus sérieuses? A-t-elle oublié ce que Mazarin disait des Français ? " Ils chantent, ils payeront. "
La tristesse est le joug le plus anti-national qu'on puisse imposer au peuple le plus gai de la terre. Trop heureux ses nouveaux dominateurs, si on leur répond que par des chansons !

Jeudi, le 13 avril 1820. / N° 104.

Le Vrai Libéral.
La liberté de la Presse.